Riskers est ravie de dédier cet article témoin, à SERGES NGASSA, agriculteur et artisan chocolatier d’origine camerounaise, installé à Annecy. Il a créé, avec son épouse, l’entreprise Cocoa Valley qui propose des chocolats de grande qualité intégralement confectionnés en interne grâce à sa plantation de cacaoyers au Cameroun
Pourriez-vous nous dire quelques mots sur vous. Comment en êtes-vous arrivé là ?
Serges Ngassa: Je suis originaire du Cameroun. J’ai commencé là bas par une carrière de cuisinier. Puis j’ai troqué ma toque de cuisinier pour un poste de logisticien en construction chez Médecins Sans Frontières. Toujours au Cameroun. Ensuite, au fil des années, je suis devenu responsable communication et recherche de fonds pour Médecins Sans Frontières à Genève. Ma carrière dans cette ONG aura en tout duré 11 ans. J’ai par la suite créé une plantation en 2010, pour ensuite créer Cocoa Valley en 2018.
Quel a été votre déclic et pourquoi avez-vous choisi de faire ce que vous faites aujourd’hui ?
Serges Ngassa: Ce qui m’a poussé à rejoindre Médecins Sans Frontières dans un premier temps, c’est que le Cameroun à l’époque était dans une situation de choléra. J’ai alors réalisé que ce n’était pas normal que l’aide vienne d’ailleurs. Je me suis demandé comment je pouvais aider mon pays. J’ai suivi ce principe aussi lors de la création de la plantation. L’objectif était dans un premier temps lié au développement durable. Mais il s’inscrit surtout dans une optique de limitation de l’exode rural qui frappe le Cameroun en créant des emplois. Dans mon pays, les jeunes partent vivre à Douala par manque d’opportunités professionnelles et d’aides comme nous pouvons en bénéficier en Europe. Et bien souvent, des bidonvilles se forment autour de la ville. Je préférais donc donner un coup de main en offrant des emplois stables plutôt que d’apporter un simple soutien financier. En agissant de cette manière, les personnes peuvent avoir la fierté de gagner l’argent dignement pour subvenir aux besoins de leurs familles. Nous avons commencé avec 23 personnes et avons été très vite rejoints par beaucoup d’autres dont deux ingénieurs qui aujourd’hui encore m’accompagnent.
En 2016, après notre première récolte, on s’est retrouvé face à la complexité du marché international. Cette difficulté nous a amené à nous réinventer. Pendant 5 ans, nous ne sommes pas arrivés à vendre nos fèves à 2.20 euros comme nous l’avions prévu. On ne pouvait payer ni nos employés ni nos charges. S’est alors posée la question de tout vendre. Mon épouse a eu la force de me pousser à me dépasser et ensemble nous avons refusé cette solution. Nous avons réuni nos employés en leur expliquant la situation. Nous leur avons demandé leur avis sur ce qui pouvait être mis en place pour que le projet aboutisse. Nous leur avons aussi dit que nous avions besoin d’eux pour que ça marche. Ils ont alors accepté de ne pas toucher de salaire pendant 6 mois pour permettre à Cocoa Valley de naître. Je leur en suis reconnaissant car s’ils n’avaient pas accepté ce sacrifice, je n’aurais jamais eu les fonds nécessaires pour lancer Cocoa Valley. En revanche, nous leur avions mis à disposition un petit jardin dans lequel ils pouvaient se servir en fruits et légumes gratuitement pendant cette période. Nous avons par la suite lancé une campagne de crowdfunding. Tous nos amis et connaissances ont participé au lancement de Cocoa Valley dont Médecins Sans Frontières qui m’a aussi offert une formation au métier de chocolatier en Italie.
Que retenez-vous de votre expérience aux côtés de Médecins Sans Frontières ?
Serges Ngassa: Pour commencer, j’ai choisi Médecins Sans Frontières pour pouvoir intervenir sur des catastrophes mondiales et relever le défi de construire rapidement des structures hospitalières efficaces pour pouvoir soigner les personnes. De plus, cette ONG apporte non seulement une formation continue mais aussi une grande aide humanitaire pour les personnes vivant sur place. Une aide physique et psychologique. Ce qui est très rare hors d’Europe.
En tant qu’entrepreneur, quels sont vos défis au quotidien ?
Serges Ngassa: Je fais face à beaucoup de défis, incluant la crise sanitaire comme nous tous ! Mais c’est le propre même de l’entrepreneur. Il ne faut rien lâcher. C’est ce qui nous fait nous lever le matin sinon on ne ferait pas ce métier. Il faut avoir des tripes d’enfer.
Quelle est selon vous, la définition de “prendre un risque” ? Quel est le plus gros risque que vous ayez pris ?
Serges Ngassa: En fait, ma vie est un univers de risques. J’ai pris le risque de lancer cette plantation sans savoir où j’allais. Étant fils d’agriculteur, j’ai vu mes aïeux et mes parents tout perdre et tout vendre à cause du marché international. Je connaissais donc bien cette problématique mais cela ne m’a pas empêché de me lancer dans le cacao. J’ai aussi quitté un emploi qui m’offrait une très bonne rémunération. Lancer une entreprise impliquait la possibilité de ne pas pouvoir me verser de salaire pendant deux ans. Travailler avec Médecins Sans Frontières, c’était aussi un risque car on faisait face à des situations de conflit.
Mais j’aime à penser que si je n’avais pas toutes ces difficultés, challenges, risques ma vie serait fade. J’ai le goût du risque. Il faut y aller et avoir la passion de faire ce que l’on fait !
Le goût du risque a enclenché aujourd’hui plus de choses que je ne l’avais prévu au départ.
Quels sont les futurs projets pour votre plantation et pour Cocoa Valley ?
Serges Ngassa: Nous voulions obtenir la certification bio cette année. C’est chose faite. L’année prochaine, nous souhaiterions voir passer la crise pour pouvoir développer Cocoa Valley en suivant notre lancée. Nous avons beaucoup évolué en 2 ans malgré la crise sanitaire. Alors qui sait où nous en serions si elle n’avait pas eu lieu !
Quel est l’aspect de Riskers qui vous inspire le plus ?
Serges Ngassa: Le courage et l’altruisme. Et bien entendu le risque. Sans ces éléments, on ne peut pas faire grand chose, on ne peut pas avancer. Ce sont ces valeurs qui portent un homme et construisent qui nous sommes.
Quelle est votre montre préférée ?
Serges Ngassa: Sans hésiter la Chapter 3. J’aime énormément son cadran bleu qui lui donne beaucoup de caractère et la rend unique.
De quel ambassadeur vous sentez vous le plus proche ?
Serges Ngassa: Pierre Muller, ambassadeur de ma montre préféré. Je m’identifie beaucoup à lui du fait de mon expérience aux côtés de Médecins Sans Frontières
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